3 Avril 2019

La rentabilité des Smart Cities
selon Stéphanie Fontugne

Le besoin d'utiliser les bonnes métriques dans le mise en place des projets de Smart Cities

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Le sujet du financement et des modèles d’affaires des smart cities est encore peu traité et pourtant il est incontournable si l’on veut passer du stade d’expérimentation dans des micros-quartiers à des projets de plus grande échelle.

La rentabilité économique et financière est évidemment un élément important pour l’avenir des projets de smart city car les projets d’investissements doivent être financés; Et, les budgets des villes, agglomérations ou cantons ne sont pas extensibles. Des financements "extérieurs" doivent donc être trouvés.

Mais, la seule rentabilité économique permet-elle d’appréhender le bénéfice des smart cities ? La réponse est non !

Les smart cities bouleversent les schémas classiques de calcul de rentabilité, et elles posent aussi la question des modèles d’affaires à appliquer à ces villes qui souhaitent devenir intelligentes.
Villes Freemium, Ville Peer to Peer ?

C'est de cela, dont nous allons parler et aussi nous évoquerons de quelle façon, les villes doivent faire évoluer leurs approches en termes d’investissements, de suivi et de financement pour enfin devenir « intelligentes ».

Pour faire simple : pour passer du slogan marketing à la mise en place de villes intelligentes, il convient désormais de déployer des financements innovants et d'utiliser des critères de rentabilité modernes.

Au-delà du label de Smart City

Les potentialités des villes intelligentes sont immenses en termes d’amélioration de la qualité de la vie pour les citoyens et d’économies budgétaires pour les villes et les collectivités.

Sans compter, le potentiel de nouveaux marchés pour les entreprises privées ou publiques qui produiront les services pour nous faciliter la vie et nous permettre de mieux et aussi de moins consommer.

Nous le voyons déjà avec les nouveaux « acteurs » de la ville, qui proposent gratuitement ou à des prix limités des services grâce à leurs plateformes numériques, tels que Uber, Waze, CityMapper, Moovit ou plus près de nous par exemple, Mobility, Fairtiq, Sharoo ou Parknow.

Car les smart cities ou villes intelligentes, sont précisément définies par l’utilisation des technologies et du numérique et par la gestion des données produites pour améliorer notre qualité de vie et nous permettre de moins consommer.

Aujourd’hui des investissements massifs sont donc nécessaires pour passer à la vitesse supérieure et dépasser le cadre de l’expérimentation et des « vitrines » estampillés du label de «ville intelligente » .

International Data Corporation – IDC- sur la base d’un sondage réalisé mondialement, estime ainsi que les investissements pour rendre les villes « intelligentes » devraient doubler entre 2018 et 2022 pour passer de $ +80 Milliards en 2018 à $ 158 Milliards en 2022.

Quels sont ces investissements ?

Comme pour tous les projets, Il est important de décrire les investissements pour déterminer leurs modèles d’affaires et aussi leur financement.

Dans les pays développés, nous ne partons pas de zéro pour bâtir les smart cities car, des infrastructures physiques et des équipements urbains existent déjà et c’est à partir de ces derniers que la « ville intelligente » se construit.

Il s’agit donc de remplacer les infrastructures vieillissantes et d’améliorer les réseaux d’infrastructures et d’équipements. Cela conduit à investir dans des capteurs, compteurs et des applications qui permettent de produire, collecter, traiter les données et gérer les flux.

Autrement dit, dans les villes intelligentes, les investissements dans les réseaux de flux de données et d’informations se superposent aux investissements dans les réseaux et infrastructures physiques pour collecter et produire ses informations. Autrement dit, une couche technologique est ajoutée aux infrastructures physiques.

Donnons l’exemple d’éclairages urbains « intelligents » avec la mise en place de lampadaires équipés de LED et de détecteurs de présence.

Ces investissements permettent non seulement de modeler la lumière en fonction du temps, des températures et des heures de passage.
Mais, ils peuvent aussi suivre la circulation, les véhicules, les piétons, la pollution de l’air ou la pollution sonore. Ils permettent enfin d’alerter sur les opérations de maintenance et d’entretien.

Dans les villes intelligentes, les investissements visent donc non seulement à baisser directement la consommation d’énergie; Mais, ils visent aussi à influencer le comportement des citoyens en vue de mieux consommer, notamment en limitant les déplacements lorsque les embouteillages sont trop nombreux ou lorsque la pollution de l’air est trop élevée.

Aussi, le calcul de rentabilité des investissements dans les Smart Cities doit non seulement intégrer des indicateurs purement économiques et financiers – baisse de la consommation- et aussi prendre en compte des facteurs plus qualitatifs qui entraînent des bénéfices sociaux et des gains pour la collectivité (exemple : baisse de la baisse des émissions de co2 et autres polluants).

Des indicateurs sociaux et liés à des bénéfices collectifs doivent donc être intégrés dans les calculs pour apprécier la rentabilité globale de ces investissements.

Des exemples concrets de rentabilité des projets de smart cities

Sur la base d’expérimentations effectuées dans différentes collectivités, on sait maintenant que certains investissements sont plus rentables que d’autres en matière de smart city.
En effet, l’éclairage, les parkings et les poubelles connectées ont les plus fortes rentabilités ; alors que les guichets virtuels (guichet d’accès aux services publics) figurent en bas du palmarès.

L’analyse réalisée par les sociétés Syntec numérique et Advancity sur 5 projets de smart cities va dans ce sens. Les 2 sociétés ont non seulement calculé la rentabilité économique – VAN financière- mais elles ont aussi traduit en €, les conséquences sociales et environnementales – VAN socio-économique- pour obtenir le bénéfice collectif – ou valeur collective.​​

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Leur étude de rentabilité montre que pour 1€ investi la valeur collective créée est de 4,83€ pour la gestion des déchets de l’agglomération de Besançon et de 6,4€ pour le projet d’éclairage public de la métropole du Grand Lyon. On peut aussi noter que pour le projet de parking et d’éclairage, la VAN financière couvrait bien plus que l’investissement de base effectué.

Pour ces projets, les villes de Rillieux La Pape (35'000 habitants) et de Besançon avaient investi respectivement € 3 Millions, il y a 11 ans et € 7 Millions en 2012. Pour le projet de parking intelligent, la ville de Strasbourg avait investi 350'000 € dans la création d’une plateforme de collecte et gestion des données.

Nous voyons donc, qu’outre les gains financiers provenant de la baisse des coûts de traitement et de maintenance, ces projets permettent aussi de diminuer directement la consommation d’énergie. Si l’on ajoute les conséquences positives sur d’autres dimensions sociales et environnementales notamment la baisse de la criminalité, des accidents et aussi les émissions de CO2, les gains sont encore bien plus élevés.

Sur la base de ces analyses, il apparaît donc que les projets de smart city peuvent être rentables et ils créés davantage de valeur qu’ils ne coutent à la collectivité ; Il convient en outre, d’ajouter des éléments qualitatifs et de les traduire en € ou CHF, pour mesurer la valeur collective globale.

En conclusion, le suivi des investissements doit intégrer des indicateurs couvrant les dimensions financières, sociales et environnementales.

Pour plus de détail sur les études Syntec et Advancity: cliquez sur le lien

Stéphanie Fontugne